mercredi 1 mai 2013

Le bien (être) de CONsommation courante - Edito Mai 2013

D’une nature omnivore – qui se nourrit de tout – l’homme moderne est insidieusement passé à un mode de vie publivore® – qui consomme n’importe quoi – et ce n’est pas le moindre des paradoxes de constater que cette évolution se fait le plus souvent au prétexte de l’être. Plutôt que de bien-être, il serait pourtant plus juste de parler de « bien avoir » ou plutôt d’ « avoir des biens » afin de lever toute ambiguïté. Mais une telle honnêteté n’est pas à l’ordre du jour puisque les illusions sont gages de rentabilité...


L’objectif étant d’accoler les deux termes par un trait d’union, le numéro de charme entre les biens et l’être consommateur se déroule grosso-modo de la façon suivante :
  1. Une publicité pour un bien quelconque diffuse le message subliminal « achetez-moi et vous vous sentirez bien »
  2. L’être, crédule et confiant par nature, obéit et se retrouve avec un nouveau bien de consommation dans son caddie®.
  3. L’être est d’abord sous le charme et légitimement fier d’une acquisition qui le caractérise comme un être d’exception : il a acheté le bien comme tout le monde !
  4. Mais l’être constate vite que le bien ne remplit pas ses promesses, que le bien-être n’est pas au rendez-vous.
  5. Frustré par son expérience, l’être n’a qu’une hâte : compenser son mal par du bien. C’est donc tout naturellement qu’il sera sensible aux derniers messages publicitaires…

Une bonne proportion des biens visent à combler un besoin primaire de reconnaissance : face à la foule ou à un groupe, être bien, c’est avant tout être comme les autres et donc bardé de marques et de gadgets. L’être s’efface alors complètement devant le paraître et le packaging ; le mal-être est masqué par les biens faisant illusion ; je consomme donc je fuis.


Le bien-être est le plus souvent légitimé par un « parce que je le vaux bien ».  Je pense, en achetant un bien, valoriser un être.  C’est malheureusement le contraire qui se produit, tout bien acheté étant avant tout la manifestation d’un état de manque. C’est lorsque j’ai faim que je mange. C’est lorsque je me sens laid que je me maquille (le plus). C’est lorsque je suis malheureux que je consomme. C’est la peur du vide qui appelle le plein !


« La nature a horreur du vide » (Aristote) mais le système en a fait son fonds de commerce ? Si la seconde partie est incontestable, l’idée d’une nature redoutant le rien est contradictoire avec la réalité du monde subatomique : si on supprimait le vide qui existe autour des noyaux des atomes, la Terre pourrait tenir dans une sphère de seulement 150 m de rayon ! L’univers est ainsi essentiellement constitué de vide… parsemé d’atomes.  Vouloir à tout prix remplir le vide de son existence apparaît ainsi contradictoire avec le respect de sa nature.


Que faut-il pour être bien, pour mieux être ? La santé, l’amour, des amis, de la spiritualité  ou un espace de liberté sont autant de réponses de choses immatérielles qui ne s’achètent et ne se négocient pas.  Un air de qualité, une eau de qualité, une nourriture de qualité sont autant de choses qui devraient être accessibles à tous mais que la société marchande a rendu – via les multiples pollutions – de plus en plus couteuses. N’est-il pas absurde de devoir désormais payer pour garantir à son être un respect minimal de sa nature ?


A force de CONsommer nous avons en effet réussi à transformer en biens de consommation ce qui relevait jadis de la générosité de la nature : de l’eau vivante, de l’air pur et de la nourriture complète et naturelle. Les biens ont dénaturé ce qui permettait à l’être d’être naturellement bien.  


La recherche du « bien-être » est par trop superficielle et axée sur le confort individualiste pour être la solution. Consommer des gadgets estampillés « bien-être », cela reste de la consommation ! Viser le mieux-être, en axant sa réflexion sur les besoins véritables de l’être, apparaît ainsi comme une solution beaucoup plus écologique.


Ne pas se vêtir de marques mais manger bio. Ne pas faire la queue pour le dernier appareil Hi-Tech mais se protéger des ondes électromagnétiques. Ne pas s’entraîner pour être plus fort ou plus rapide mais pour mieux respirer ou méditer. Ne pas se saouler de sodas lights ou exotiques mais retrouver le goût et la vitalité d’une eau vivante.  La santé n’a pas de prix et son coût est bien moindre que celui de la maladie ! 


Dans cette optique et une fois les besoins vitaux de santé et de vitalité sécurisés, mieux être supposera d’arriver à limiter l’avoir, de passer à la simplicité volontaire, de faire du vide, de réduire naturellement le nombre de ses biens. « On est riche de ce qu’on ne possède pas » disait Gandhi.


Frat’airnellement,


Fencienne & Benoît Saint Girons
Centre Oasis à Genève

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